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Gouvernance

O. Jarosz : « Le lobbying n’est pas exclusivement réservé aux grands clubs du football européen »

Photo DeFodi Images / Icon Sport

Sujet sous-estimé voire éludé par la plupart des clubs de football européen, le lobbying constitue pourtant une activité essentielle pour peser sur l’évolution des règlements et des lois. Quelques formations du Vieux Continent sont néanmoins devenues des spécialistes en la matière, parvenant à bien défendre leurs intérêts sur des questions d’ordre politique, économique ou de gouvernance. Quelles sont leurs stratégies ? Comment s’y prennent-elles pour se faire entendre ? On en discute avec Olivier Jarosz, Membre du Comité Exécutif de LTT Sports, cabinet de conseil en stratégie et management. Entretien.

Comment les grands clubs du football européen cherchent-ils à défendre / préserver leurs intérêts auprès des institutions politiques et des organes de régulation du football ?

En France, le terme lobbying est généralement connoté négativement. Pourtant, le lobbying n’entraine pas systématiquement des répercussions négatives. Cela permet parfois de corriger des orientations trop généralistes. Certaines actions de lobbying peuvent ainsi aller dans le sens de l’intérêt général.

Par ailleurs, le lobbying n’est pas exclusivement réservé aux grands clubs du football européen. Tous les clubs, à leur niveau, peuvent faire du lobbying. Ils ont tous accès aux pouvoirs publics et à des élus. Un club bien géré reçoit très régulièrement son maire au stade par exemple. Car c’est dans son intérêt – peu importe son actionnariat – d’entretenir de très bonnes relations avec son écosystème local.

Pour apprécier les activités de lobbying d’un club de football professionnel, il faut dresser une matrice avec un axe vertical représentant l’échelle d’exercice des activités de lobbying – le club cherche-t-il à exercer une influence au niveau local, national ou international – et un axe horizontal matérialisant le niveau de proactivité du club – est-il actif ou passif dans l’évolution des règlements et des lois touchant à ses activités. Toutes les caractéristiques du club vont entrer en ligne de compte pour le positionner sur cette matrice. Dans quel pays évolue-t-il ? Est-ce un membre d’un championnat majeur européen ? Dispute-t-il régulièrement les compétitions continentales ? Sur le sujet du lobbying, chaque club est un cas singulier.

« L’externalisation des activités dans le football européen n’est pas propre au lobbying »

Toutefois, pour la plupart des clubs, le lobbying est subi et mal géré. Ils sont donc victimes des décisions prises. Les clubs commencent généralement à cultiver des relations une fois que le problème a éclaté ! Ils ne sont pas assez proactifs sur les sujets politiques et de gouvernance.

Les clubs européens n’ont-ils pas trop tendance à déléguer les actions de lobbying à leur syndicat ?

Complètement. Mais l’externalisation des activités dans le football européen n’est pas propre au lobbying. Les clubs ont tendance à externaliser de très nombreuses activités dans des domaines essentiels comme le marketing ou le développement commercial. Et ce sont pourtant des activités derrière lesquelles on peut associer directement des lignes de revenus ! Pour les questions d’ordre politique qui ne sont pas financièrement palpables – du moins pas directement – les clubs sont évidemment prêts à déléguer.

Ecosystème club

Club Management Guide, Jarosz & al. (2018)

En France, il y a en plus cette tradition de passer par les syndicats pour toutes les négociations / questions d’ordre social. C’est donc naturel de confier une telle activité à un syndicat ou à un groupe de pression. Par conséquent, les intérêts des différents clubs ne sont pas toujours défendus de manière optimale.

Par ailleurs, comme je l’ai dit précédemment, les clubs se retrouvent plus souvent dans une position de réaction plutôt que d’action. Leurs dirigeants sont alors contraints d’adopter une attitude de bulldozer en tapant lourdement du poing sur la table car ils réagissent une fois que le problème a déjà éclaté. Ils sont alors obligés d’en faire des tonnes – notamment dans les médias – pour essayer de corriger le tir et cela engendre des dégâts en termes d’image sans forcément obtenir les résultats espérés derrière.

Observez-vous une montée en puissance des acteurs du football européen en matière de lobbying ? Certains d’entre eux cherchent-ils à se rapprocher des grandes institutions politiques dont notamment celles de l’Union Européenne ?

O. Jarosz : « Le lobbying n’est pas exclusivement réservé aux grands clubs du football européen »
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