aides d'Etat financement des stades
Interview

Financement des stades : attention aux aides (illégales) d’Etat !

Photo Icon Sport

Si les clubs professionnels français ont pour habitude de faire appel aux collectivités pour concrétiser des projets de modernisation ou de construction de nouvelles infrastructures sportives ; les autorités publiques ne peuvent soutenir sans limite de tels desseins. Leur implication doit répondre au cadre (strict) fixé par le droit européen de la concurrence. Ainsi, un stade vendu par une collectivité en-dessous du prix du marché à son club résident pourrait être considéré comme une aide d’Etat illégale aux yeux de l’UE. Il en va de même pour un loyer trop bas facturé à un club professionnel. Lors d’un entretien accordé à Ecofoot, Mes Marianne Clayton et Maria J. Segura du cabinet Clayton & Segura, rappellent les conditions que doivent remplir des investissements publics dans une infrastructure sportive pour qu’ils soient en conformité avec le droit européen.

Ces derniers mois, plusieurs clubs professionnels français dont le PSG ont manifesté leur volonté d’acheter leur enceinte sportive. Mais des désaccords existent avec la collectivité propriétaire de l’enceinte sportive au sujet du prix de cession. Une collectivité peut-elle fixer librement le prix de vente d’un stade à son club résident au regard du droit européen ?

Echapper à la qualification d’aide d’Etat est la voie la plus simple pour éviter toute violation du droit européen. Dans le contexte de la cession / construction de stades, il y a deux options pour échapper à cette qualification qui correspondent chacune à une déclinaison du principe de l’opérateur privé en économie de marché. En vertu de ce principe, une transaction échappera à la qualification d’aide d’Etat lorsque l’autorité publique s’est comportée comme l’aurait fait tout opérateur privé. Dans un tel cas aucun avantage particulier n’a en effet été octroyé.

La première option correspond au cas où l’autorité publique intervient seule : elle cède une infrastructure, la loue. Dans un tel cas, les parties prenantes peuvent démontrer que la transaction a bien été conclue au prix du marché. Aucun avantage n’a été octroyé au club acquéreur du stade et il n’y a donc plus de sujet puisqu’une des 5 conditions définissant les aides d’Etat qui est l’octroi d’un avantage n’est pas remplie. Le cas est réglé.

La deuxième option correspond au cas où l’autorité publique n’intervient pas seule mais aux côtés d’autres opérateurs. Ainsi, dans le cas de la construction d’un stade, on retrouve souvent des montages sous forme de PPP (ndlr : Partenariat Public-Privé). On présume alors que l’autorité publique intervient selon les mêmes termes que les acteurs privés impliqués dans le montage. Elle agit comme un acteur rationnel en quête d’un retour sur investissement. Ces investissements ne sont alors pas considérés comme des aides d’Etat. En effet, l’autorité publique est intervenue comme les acteurs privés ou pari passu.

Comment prouve-t-on qu’une transaction a bien été conclue au prix du marché ?

Dans le cadre d’une procédure de marché public, plusieurs offres ont pu être formulées par différents acquéreurs potentiels. Dans ce cas, on estime que le prix de vente obtenu est bien celui de marché. Le prix de marché peut également être prouvé par le biais d’une expertise. Des experts indépendants vont alors déterminer un prix de l’actif qui sera considéré comme celui du marché.

Le prix de marché est-il forcément respecté quand un stade est vendu au prix estimé par les Domaines ?

Un stade reste une infrastructure particulière. On ne se situe pas dans la vente d’hectares de terres agraires par exemple. La valorisation effectuée par les Domaines correspond-elle toujours au prix du marché ? Si un acteur estime que la valorisation n’est pas la bonne, cela ne l’empêchera pas de porter plainte. Un stade vendu au prix évalué par les Domaines ne constitue pas une garantie que le prix de marché est respecté.

Est-il possible pour un club professionnel d’être épaulé par une autorité publique dans un projet de construction / rachat de stade même si le soutien ne peut échapper à la qualification d’aide d’Etat ?

Le droit européen des aides d’Etat a une interprétation très extensive de l’autorité publique. Dès qu’un acteur public intervient dans une transaction, sous quelque forme que ce soit, il faut immédiatement se poser la question de sa conformité au regard du droit européen.

« Les aides d’Etat peuvent être autorisées en certains cas […] Le RGEC est censé couvrir 90% des dossiers d’aides d’Etat au sein de l’UE »

Si aucun des deux principes évoqués précédemment n’est respecté – prix de marché ou pari passu – alors on rentre dans une zone risquée. Cela signifie tout simplement qu’il y a eu une intervention publique qui relève de la qualification d’aide d’Etat. Or, par principe, les aides d’Etat sont interdites dans le droit européen. Il faudra donc démontrer que l’intervention publique rentre dans un des cas d’exception prévus par la réglementation européenne. Il faut trouver ce qu’on appelle dans le domaine des aides d’Etat une base de compatibilité.

Dans le droit européen, existe-t-il des exceptions spécifiques au secteur du sport, accordant plus de souplesse aux investissements publics dans cette activité ?

Financement des stades : attention aux aides (illégales) d’Etat !
To Top
Send this to a friend