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Vers le décollage économique du basket professionnel français ?

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Les critiques émises à l’encontre du fonctionnement du basket professionnel français sont parfois acerbes. D’autant qu’elles proviennent généralement de dirigeants ou de propriétaires de clubs hexagonaux. Pourtant, le basket professionnel français semble emprunter la bonne voie. De nombreux clubs sont impliqués dans des projets de modernisation de salles, les budgets des principales formations de l’élite sont en croissance et, pour la première fois depuis longtemps, la Betclic Elite compte dans ses rangs un candidat au titre en EuroLeague ! Pour autant, certaines réformes sont encore attendues pour donner un nouveau coup d’accélérateur à la croissance économique du basket hexagonal. Vincent Bot, Enseignant Universitaire en Management du Sport et Consultant Stratégique auprès de nombreux acteurs du basket hexagonal, nous livre ses analyses éclairées sur le fonctionnement du basket français de haut niveau et les mesures à prendre pour renforcer sa compétitivité. Entretien.

De nombreux clubs professionnels français évoluent ou vont évoluer dans de nouvelles salles aux capacités élargies (LDLC ASVEL, SIG Strasbourg, Paris Basket, Orléans Loiret Basket…). Que vous inspire ce mouvement de modernisation des salles ? Permettra-t-il au basket professionnel français de franchir un nouveau cap économique ?

Ce mouvement est une réelle évolution depuis la commission Arenas 2015 avec le rapport livré en mars 2010 par Daniel Costantini et Frédéric Besnier. Il profite à l’ensemble du mouvement sportif professionnel. Il a permis notamment au handball professionnel de s’installer dans les métropoles hexagonales (Nantes, Aix-en-Provence, Montpellier…) et de prendre de l’avance sur le basket dans sa stratégie de métropolisation. C’est fondamental dans les sports de salle de s’inscrire dans cette optique pour toucher de larges audiences et atteindre le grand public.

Il y a plusieurs projets d’arenas en cours de livraison qui pourraient profiter au basket hexagonal :  Orléans (10 000 places), Caen (4 200 places), Saint-Étienne (4 200 places)… et d’autres déjà livrées à Angers (4 200 places), Reims (5 500 places), Bordeaux (7 500 places), Montpellier (10 000 places), Orchies (5 000 places) , Périgueux (5 000 places), Poitiers (enceinte modulaire d’une capacité de 4 000 places pour le basket)…

Je constate que les plus grandes métropoles accusent un retard en termes d’infrastructures et peinent à pousser des projets d’arenas en configuration sport supérieurs à 10 000 places (Marseille, Toulouse, Bordeaux, Nantes, Nice…). De nombreux projets s’installent puis s’isolent en périphérie sans zone de chalandise attractive permettant d’y organiser une fréquence soutenue d’événements. Je suis convaincu que les promoteurs de centres commerciaux doivent être parties prenantes dans ce type de projet, eux qui optent de plus en plus pour les loisirs récréatifs et le divertissement.

Concernant les clubs de LNB cités, ils n’ont pas encore pris possession de leur outil d’exploitation mais ils ont clairement la volonté entrepreneuriale d’aller de l’avant en augmentant leur capacité d’accueil en hospitalités et sur la partie grand public pour accroître leurs revenus et leur autonomie. Il y a une prise de conscience chez certains clubs que l’expérience spectateur est fondamentale pour s’émanciper des résultats sportifs. « On ne vient pas voir qu’un simple match de sport mais vivre une expérience divertissante » : c’est toute la culture que David Kahn tente de développer avec le Paris Basketball. Certains clubs oublient encore de remettre le public au cœur du projet pour développer leurs lignes de revenus. Cette approche pourrait pourtant attirer de nouveaux partenaires souhaitant communiquer avec ce public.

Spécialiste en Stratégie des Organisations Sportives et Stratégie Marketing, Vincent Bot fait partie de la nouvelle génération de Managers du Sport qui apporte un regard nouveau sur les enjeux stratégiques des clubs professionnels. Crédit Photo : Adrien Naude

Le basket français pourrait franchir un nouveau cap dans sa professionnalisation en changeant d’échelle en matière d’exploitation pour se rapprocher des standards de la Liga ACB. La marche peut paraître haute pour certains clubs car il faut tabler parfois sur 3 à 5 ans pour créer la culture « d’aller au stade » chez le spectateur et remplir sa salle. Il faut pouvoir avoir les reins solides et parvenir à mobiliser du public dans les zones de chalandise respectives, dans des secteurs géographiques parfois ultra-concurrentiels.

Aujourd’hui, d’un point de vue économique, un duo se détache très clairement par le haut au sein du basket professionnel français. L’AS Monaco Basket et l’ASVEL ont-ils développé un modèle suffisamment robuste pour ambitionner le titre en EuroLeague ?

L’AS Monaco bénéficie d’un régime fiscal privilégié et l’implication d’un mécène qui lui permettent d’avancer beaucoup plus rapidement que l’ASVEL. Monaco est un prétendant au titre en EuroLeague dès cette saison et peut se permettre de signer des joueurs avec des contrats au-dessus de 1 m€. C’est du jamais vu dans l’histoire du basket hexagonal ! Mais le club commence seulement à construire son modèle économique en renforçant en ce moment son staff administratif et commercial. Au bout d’un moment, il y aura une recherche d’équilibre budgétaire.

L’ASVEL prend le temps de construire les bases de son modèle économique et la livraison de la LDLC Arena est une étape primordiale. L’entrée au capital d’OL Groupe en 2019 offre des garanties solides au club pour construire durablement. Le rachat d’OL Groupe par John Textor sera déterminant pour la suite de l’aventure et doit dicter le tempo. On peut espérer voir l’ASVEL compétitive en EuroLeague d’ici 3 ans. L’essentiel c’est de durer et de grandir.

« Monaco est un prétendant au titre en EuroLeague dès cette saison »

Par ailleurs, l’intérêt des Français pour l’EuroLeague a augmenté de 60% depuis 2018 selon une étude de l’institut Nielsen Sports publiée en 2021. C’est une très bonne nouvelle ! Ça coïncide avec le retour dans cette compétition de l’ASVEL. Pour concrétiser cet intérêt du grand public, il est nécessaire de stabiliser la diffusion. En effet, aucun diffuseur ne s’était positionné sur les droits TV en septembre dernier. FEDCOM, propriétaire de l’AS Monaco, s’est rué sur l’occasion pour acquérir les droits, créer sa plateforme OTT SKWEEK et revendre un pack de 30 matches à la Chaîne l’Equipe, concernant essentiellement la diffusion des rencontres de l’AS Monaco et de l’ASVEL.

Un troisième club français parviendra-t-il à terme à rejoindre les deux mastodontes de Betclic Elite au niveau budgétaire ? Quel est le projet le plus prometteur de développement au sein du basket professionnel français ?

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