Stades

Au Portugal, des stades au bord du vide !

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Joseolgon - CC BY-SA 3.0

L’Euro 2004 aura laissé pour principal héritage une peine incommensurable dans les mémoires portugaises après la défaite face à la Grèce en finale. Mais la compétition aura également occasionné une politique ambitieuse de modernisation des stades, avec la construction d’édifices non-adaptés à la culture économique et footballistique du pays. Décryptage par Guillaume Monteiro.

L’essor du professionnalisme au Portugal a donné lieu à un championnat à deux vitesses. Une tendance qui s’est encore renforcée au cours des 20 dernières années. D’un côté, les deux clubs lisboètes et le FC Porto luttent chaque année pour le titre ; de l’autre côté, des clubs de second rang qui tiennent un rôle de faire-valoir au sein du championnat de Liga Nos.

Rares sont donc les affiches à suspens, où le résultat final n’est pas connu d’avance. Des caractéristiques qui ne favorisent donc pas les fortes affluences au sein du championnat portugais. Si les trois cadors parviennent à maintenir un taux de remplissage supérieur à 65% pour des revenus de billetterie compris entre 15 M€ et 30 M€ par saison ; de telles sommes relèvent du domaine de l’utopie pour les autres clubs portugais !

En effet, avec des taux de remplissage régulièrement inférieurs à 50%, les autres clubs du pays ne parviennent à remplir leur stade que lors des réceptions des trois cadors du championnat. Deux clubs parviennent néanmoins à émerger : le Vitória Guimarães a notamment affiché une affluence moyenne de 19 000 spectateurs l’an dernier, grâce notamment à sa belle quatrième place finale. Et le Sporting Braga affiche régulièrement des affluences supérieures à 15 000 spectateurs. Seul hic : les deux clubs disposent de leur propre stade de 30 000 places assises, alors qu’ils évoluent à une trentaine de kilomètres de distance ! Deux stades qui ont notamment été édifiés lors de l’organisation de l’EURO 2004. La construction d’une seule enceinte avec une exploitation mutualisée aurait alors certainement été une solution moins onéreuse et plus adaptée à la situation.

Et la situation est encore moins réjouissante pour le reste de la troupe ! Certains clubs comme Belenenses ou encore le Vitória Setúbal affichent des taux de remplissage de l’ordre de 20% ! L’exemple le plus frappant est sans doute celui du Boavista. Dans l’euphorie du titre remporté en 2001 et la perspective de l’EURO 2004, une nouvelle enceinte ultramoderne de 30 000 places – Estádio do Bessa Século XXI – a été construite à Porto. Mais, suite à des problèmes financiers, Boavista sera rapidement rétrogradé dans les divisions inférieures du pays. Et malgré son retour en Liga Nos depuis 2014, le club peine à franchir la barre des 5 000 spectateurs de moyenne lors de ses rencontres de championnat.

Des stades délaissés et encombrants

Au total, ce ne sont pas moins de 7 nouveaux stades qui ont été construits pour l’organisation de l’EURO 2004. Et trois autres ont été rénovés. Aujourd’hui, certaines enceintes sont à l’abandon tandis que d’autres constituent de véritables fardeaux financiers pour les municipalités concernées.

Le stade d’Aveiro constitue un excellent exemple. Construire pour accueillir l’EURO 2004 et bénéficiant d’une capacité de 30 000 places, l’enceinte n’est pas du tout adaptée aux besoins de cette agglomération de 80 000 habitants. Après avoir rencontré des problèmes financiers et subi des rétrogradations, le club résident Beira-Mar a lutté avec la municipalité afin de revenir jouer en 2015 dans sa traditionnelle enceinte de Mario Duarte, plus conforme aux besoins du club. Une négociation qui avait été rendue difficile par les importants investissements réalisés par les pouvoirs publics – environ 60 M€ – pour faire sortir de terre ce nouveau stade.

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La situation n’est guère plus reluisante concernant l’Estádio Algarve. Egalement construit pour accueillir deux rencontres de l’EURO 2004, cette enceinte aux dimensions trop importantes n’a pas permis à son club résident de faire un bond en avant dans la hiérarchie sportive. Pire, le club d’Algarve a même connu une faillite, avant de renaître de ses cendres grâce à des entrepreneurs locaux. L’enceinte est néanmoins aujourd’hui utilisée pour… les rencontres internationales de la sélection de Gibraltar !

Enfin, la gestion de l’Estádio Nacional do Jamor laisse également perplexe. Stade de 37 500 places situé à Lisbonne, il a été jusqu’en 2003 le stade officiel de la sélection portugaise. Mais, en raison de sa vétusté, le comité d’organisation de l’EURO 2004 n’a pas jugé bon de le retenir pour la compétition. Résultat : l’agglomération lisboète compte aujourd’hui trois enceintes de taille importante et l’Estádio Nacional do Jamor n’accueille qu’un événement footballistique majeur par saison : la finale de la Coupe du Portugal.

Aujourd’hui, le Portugal compte une douzaine de stades bénéficiant d’une capacité supérieure à 30 000 places assises. Une offre qui n’est pas adaptée au marché portugais et qui engendre aujourd’hui des problèmes dans le développement des revenus de billetterie de certains clubs, sans évoquer l’impact négatif sur les comptes publics. Les clubs professionnels portugais devront néanmoins faire face à cette problématique pour retrouver une hausse de compétitivité sportive et financière…

Source photo : Wikipedia – CC BY-SA 3.0

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