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Les BATX (bientôt) intéressés par les droits TV de Ligue 1 ?

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Alors que Mediapro est ressorti comme le grand vainqueur surprise du dernier appel d’offres de droits TV domestiques de L1 émis par la Ligue de Football Professionnel, d’autres rebondissements pourraient survenir d’ici l’entrée en vigueur des nouveaux contrats. Et de nouveaux acteurs pourraient bien se positionner, entrainant une nouvelle surenchère des prix.

« La LFP ne pourra plus s’appuyer exclusivement sur la concurrence Canal +/BeIN Sports pour augmenter ses droits TV. » Une prémonition, annoncée dans nos colonnes il y a tout juste un an par Michel Seydoux, qui s’est avérée juste.

Non seulement l’entrée de nouveaux acteurs – en l’occurrence le groupe espagnol Mediapro – a permis de sensiblement revaloriser les droits TV domestiques de L1 – franchissant alors la barre des 1,1 Md€ par saison alors qu’il reste plusieurs lots à commercialiser – mais en plus, cet appel d’offres a éjecté du jeu Canal +, diffuseur historique du championnat français.

Mais les surprises pourraient être encore plus importantes d’ici l’entrée en vigueur effective des nouveaux contrats TV, en 2020. Si Mediapro ne cesse d’annoncer la création d’une chaîne de télévision pour pouvoir diffuser les matchs de L1 nouvellement acquis ; la LFP a en réalité ouvert un véritable jeu spéculatif en octroyant la possibilité de sous-licencier les droits TV de L1. Et Mediapro compte certainement sur l’entrée de nouveaux acteurs dans les deux années à venir pour revendre au prix fort des lots suscitant les convoitises.

Les GAFA en position d’attente

« Il serait étonnant que les acteurs traditionnels – Canal +, RMC Sport ou BeIN Sports – se positionnent pour des lots sous-licenciés. Auquel cas, ils auraient au préalable formulé des offres conséquentes pour les remporter lors du dernier appel d’offres organisé par la LFP » nous confiait dernièrement Virgile Caillet, Délégué Général chez UNION Sport & Cycle et Expert des problématiques foot-business.

Si, en effet, un retour des acteurs traditionnels à la table des négociations parait peu probable ; en revanche, la surenchère pourrait probablement provenir des acteurs du web. Depuis plusieurs mois déjà, certains acteurs américains de l’univers des GAFA lorgnent sur l’acquisition de droits TV sur le marché européen pour renforcer leurs audiences et accroître le temps passé sur leur plateforme. Didier Quillot, Directeur Général Exécutif de la LFP, n’a d’ailleurs pas caché avoir discuté avec des opérateurs tels que Facebook et Amazon en amont de l’appel d’offres.

Et l’un d’entre eux a sauté le pas dernièrement ! Ainsi, Amazon a acquis un lot de droits TV domestiques de Premier League pour la période 2019-22. Le géant américain de l’e-commerce pourra retransmettre en live sur sa plateforme de streaming Amazon Prime 20 rencontres de Premier League par saison. Si le montant de l’investissement n’a pas été communiqué officiellement, les experts du secteur estiment qu’Amazon a accepté de débourser une somme supérieure à 50 M€ pour acquérir de tels droits.

Un investissement qui s’inscrit dans la stratégie actuellement développée par la firme de Seattle. Au mois d’août dernier, Amazon avait déjà misé 50 M$ pour retransmettre en direct aux Etats-Unis 11 rencontres de NFL par saison. Depuis, la plateforme a également acquis les droits de diffusion de l’US Open en Grande-Bretagne pour les 5 prochaines années. Une stratégie de diversification qui doit permettre à Amazon de fidéliser ses clients.

Et si les BATX passaient à l’offensive ?

Alors que les GAFA sont entrés dans une phase de test, il semble peu probable de voir un géant du net américain investir plusieurs centaines de millions d’euros d’ici 2 ans pour acquérir des droits TV domestiques en France. Amazon va sans doute, dans un premier temps, chercher le bon modèle économique pour rentabiliser au mieux ses acquisitions sportives.

En revanche, d’autres géants venus du web pourraient se positionner pour acquérir de tels lots. C’est le cas notamment des BATX – autrement dit les GAFA chinois – qui réfléchissent depuis de nombreux mois à la meilleure stratégie à employer pour conquérir les marchés européens. Et une acquisition de droits sportifs sur un marché majeur européen pourrait grandement les aider.

Dans cette optique, Tencent parait être l’acteur le plus enclin à formuler une offre. Cherchant depuis de nombreuses années à développer ses activités en Europe, on prête aux dirigeants du géant chinois l’intention de lancer sur les différents marchés européens une version optimisée de son réseau social WeChat. En ce sens, Tencent a acquis au mois de novembre dernier 12% du capital social de Snap, maison mère de Snapchat, réseau social américain très populaire auprès des moins de 24 ans Européens. Un mouvement qui pourrait entraîner l’adoption de technologies WeChat au sein du réseau social Snapchat.

Cherchant à devenir un géant de l’entertainment, Tencent est également très présent dans l’univers de l’eSport. Il possède plus de 80% de Supercell – éditeur de très populaires titres sur mobile tels que Clash of Clans ou encore Clash Royale – et dispose d’une participation majoritaire dans Epic Games, éditeur de Fortnite. En Europe, Tencent a dernièrement acquis 5% du capital social du géant français Ubisoft. Enfin, le groupe chinois a également attaqué le marché du streaming musical en annonçant un accord de participations croisées avec Spotify. Nul doute que l’acquisition de droits TV sportifs à forte valeur ajoutée s’inscrirait parfaitement dans une stratégie alliant contenus et technologie.

Alibaba est l’autre géant chinois qui pourrait porter un intérêt aux droits TV de Ligue 1. Cherchant à imposer sa marque Aliexpress sur les marchés européens, l’acteur majeur de l’e-commerce chinois rencontre des difficultés à croître sur le Vieux Continent, en raison notamment d’un déficit de notoriété et d’une certaine réputation, liée à la présence par le passé de produits contrefaits sur sa plateforme.

Quoi de mieux que l’acquisition de puissants droits TV sportifs sur un marché européen majeur pour asseoir sa crédibilité ? D’autant qu’Alibaba possède déjà un pied dans l’univers du ballon rond : en 2014, l’acteur majeur de l’e-commerce chinois a racheté 50% des parts du club de Guangzhou Evergrande contre un investissement de 140 M€. « Le charme du football est grand (…), ce n’est pas une décision dictée par l’impulsion, c’est une décision rationnelle et mûrement réfléchie » avait alors exprimé à l’époque Jack Ma, patron d’Alibaba.

Possédant un groupe chinois comme actionnaire de référence – Orient Hontai Capital détient plus de 50% de Mediapro depuis le début de l’année 2018 – le groupe espagnol ne devrait pas rencontrer de difficultés pour entrer en contact avec les différents opérateurs chinois. Néanmoins, le timing semble particulièrement serré pour convaincre de tels acteurs de miser sur le football pour accroître leurs activités en France. Mais la commercialisation des droits TV domestiques de L1 pour la période 2020-24 pourrait encore réserver de nombreuses surprises…

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