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PSG, un inéluctable perdant ?

psg vs real madrid duel
Keitma / Shutterstock.com

Saint Valentin 2018, le PSG va jouer l’un des matchs les plus importants de sa saison, peut-être même de son histoire. Les médias français et les supporters parisiens attendent depuis près de deux mois ce 8ème de finale aller de Ligue des Champions. L’impatience est grande. Seul souci, face à Paris, se trouve l’un des trois plus grands clubs de l’histoire, le Real Madrid. Retour en chiffres sur une comparaison loin d’être flatteuse pour le club parisien. Par Jean-Baptiste Guégan.

Paris, presque favori dans un contexte incertain

En termes de résultats bruts, le PSG d’Unai Emery est plus compétitif aujourd’hui que le Real Madrid de Zinedine Zidane. Comme on le dit dans le sport américain, Paris profite du momentum sportif. Loin devant dans son Championnat – 12 points d’avance à 13 journées de la fin – le PSG est qualifié dans les deux Coupes nationales et se dirige vers Madrid, serein.

Porté par une dynamique de six victoires consécutives, le club parisien n’a été défait qu’à seulement trois reprises depuis le début de la saison. Et son vestiaire se porte toujours aussi bien, n’en déplaise à certains, depuis qu’il s’est renforcé avec les arrivées de Neymar, Dani Alvès et Kylian Mbappé.

A l’inverse, le Real Madrid, champion en titre et double tenant de la Ligue aux grandes oreilles, est distancé en Championnat. Seulement 4ème et relégué à 17 points du FC Barcelone avec un match en moins, le club merengue est sportivement à la peine.

Déjà défait à six reprises et éliminé de la Coupe d’Espagne, le Real Madrid n’a plus la même faim.

Affaibli à force ne pas vouloir se renforcer, le Champion du monde des clubs 2017 fait peine à voir. Et ce ne sont pas ses dernières sorties qui rassureront l’ensemble des Madridistes. Malgré deux victoires contre Valence et la Real Sociedad, Florentino Perez et Zinedine Zidane savent le défi qui les attend et la crise qui se profilera si la victoire n’est pas au rendez-vous de ces huitièmes de finale…

En dehors de toute folie catalane, l’Espagne réussit à Paris

Paris peut faire le match et apparaît pour une fois, en position de force. Comme en témoigne la communication faussement confiante du Real et de son capitaine Sergio Ramos. Neymar y est pour beaucoup. A défaut d’être pleinement favori, le contexte sportif est pour le moins favorable au club de Nasser Al Khelaifi. Ce que l’histoire des vingt dernières années ne dément pas.

Si le PSG a peiné ces derniers temps face au FC Barcelone, l’Espagne et le Real Madrid lui réussissent plutôt bien. Sans omettre la remontada inexcusable de la saison passée ou l’impensable 4-3 contre le Deportivo la Corogne, aucun autre club espagnol que le Barça n’a défait le club parisien lors d’un match à élimination directe.

Quant au club madrilène, il sourit plutôt aux Parisiens. Depuis la refonte de la Ligue des Champions en 1992, les deux clubs se sont rencontrés à six reprises et le PSG n’a été battu que deux fois, sans que cela n’ait d’incidence directe sur la suite de ses aventures européennes. Personne n’a d’ailleurs oublié le match de 1993 où Antoine Kombouaré torpilla d’un coup de tête magistral, les espoirs madrilènes de se qualifier pour les demi-finales de la Coupe de l’UEFA.

Hélas, toutes les séries ont une fin et les résultats du jour sont loin d’être ceux du lendemain. En effet, si la conjoncture profite plutôt au club parisien, la confrontation des deux clubs hors terrain est sans conteste à l’avantage du grand d’Espagne qu’est le Real Madrid.

Le Real Madrid gagnant et loin de devant : les chiffres ne mentent pas

Dominé au classement Deloitte Money League 2018, le PSG ne figure qu’au septième rang des plus grands clubs de football du monde. Avec 486 millions d’euros générés pour l’année 2016-2017, il recule même dans le top 10 par rapport à l’an passé et l’écart se creuse avec son concurrent du jour.

Le Real Madrid pour sa part affiche des revenus en croissance avec 674 millions d’euros générés sur la même période, ce qui l’installe derrière l’inamovible Manchester United. Ce différentiel de revenus de 188 millions atteste du pas qu’il reste à franchir pour le club parisien, sans parler des massifs investissements qatariens dont il lui faudra s’affranchir.

Avec un écart de revenus quasi-équivalent au transfert de Kylian Mbappé, la compétitivité sportive du club parisien s’en trouve affectée face à son rival actuel.

Selon le CIES, le PSG a dû dépenser 805 millions d’euros (2ème rang mondial) pour construire sportivement un effectif à la hauteur de ses rêves, là où le Real Madrid, au sommet depuis des années, en a dépensé seulement un peu plus de la moitié (497 millions, 6ème rang) pour s’y maintenir.

Mais l’écart sportif se ressent encore malgré un recrutement estival des plus somptuaires (Neymar, Mbappé, Alvès). Selon le site Transfertmarkt, le PSG se présentera au Stade Santiago Bernabeu avec un effectif d’une valeur de 756 millions d’euros contre 858 millions pour son opposant madrilène. Là se niche la différence entre un club qui détient un Ballon d’or (Cristiano Ronaldo) et un autre qui accueille ceux qui le deviendront plus tard (Neymar, Mbappé) ou qu’ils l’ont obtenu une fois qu’ils l’ont quitté (George Weah, Ronaldinho…).

Mais il n’y a pas qu’au niveau des effectifs que le différentiel est conséquent. Le PSG n’est pas encore le super-club global dont rêve le Qatar et les supporters parisiens. Distancé sur les réseaux, le club parisien a trois fois moins de fans sur Facebook (33 millions de like) que le Real Madrid (106), 8 fois moins de suiveurs sur Twitter (6 millions contre 48 millions tous comptes confondus) et 5 fois moins d’adeptes sur Instagram (11,5 millions contre 55 millions). Son internationalisation se poursuit mais il est loin de pouvoir encore rivaliser.

Tous ces écarts se concrétisent d’ailleurs en termes de valorisations de marque. Dans le dernier classement Forbes 2017, le Real Madrid est la première marque de football avec une valorisation estimée à 3,650 milliards de dollars contre seulement 814 millions pour le PSG, classé au 13ème rang.

Au classement BRAND des marques de football les plus puissantes du monde, là encore le Real Madrid (1er) domine outrageusement le PSG (10ème).

Avec un Parc des Princes presque deux moins important en capacité que Santiago Bernabeu (48000 contre 81000) , des revenus match-day inférieurs de 34 % (136 millions d’euros contre 90 millions) et une structure des revenus plus vertueuse pour le Real Madrid, le PSG n’est pas pour l’instant le rival que l’on espère.

Si l’on ajoute à cela un fair play financier qui cible plus particulièrement le club parisien et des revenus liés à des sponsors qatariens qui posent question, le business model du PSG ne semble pas économiquement à la hauteur du choc qui s’annonce, malgré le fort soutien de l’émirat qatari.

Le temps, c’est de l’argent mais cela ne s’achète pas

Le PSG se présente comme un nouvel entrant dans la cour des grands d’Europe. Mais avant de pleinement en faire partie, il lui faudra quelque chose qui ne s’achète pas : du temps.

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Fondé en 1970, le club parisien est jeune. Le sommet de la hiérarchie européenne est son objectif depuis seulement six ans, là où le Real existe depuis 116 ans et affiche déjà douze Coupes d’Europe des clubs champions…

Certes, le PSG a eu une trajectoire européenne sous l’ère Canal+, bien avant les investissements colossaux du Qatar. Sa victoire en Coupe d’Europe des Clubs vainqueurs de Coupe en 1996 l’atteste. Mais au rang des comparaisons, le Real Madrid a une avance historique, même si la confiance sportive actuellement lui manque à l’heure de ce duel au sommet.

Parmi les super-clubs qui trônent au sommet du football européen et les hyper-teams qui caractérisent le sport contemporain en concentrant les talents (Golden State Warriors, New England Patriots, Manchester City), le PSG n’est qu’un candidat à la victoire finale là où le Real Madrid est un habitué au banquet des festivités.

La “glorieuse incertitude du sport”, la chance du PSG

Heureusement pour nous et les supporters parisiens, le football est statistiquement le sport le plus incertain et c’est justement là que se niche la chance du PSG. Les rapports de force initiaux ont moins de pertinence en football que dans tous les autres sports, d’autant que Paris n’est plus une équipe en construction ou en quête d’expérience.

Si le favori des pronostics et le vainqueur final sont souvent les plus riches et les mieux dotés, le ballon rond nous offre toujours des surprises qui défient les bilans financiers. Leicester a renversé la Premier League en 2016. L’Atletico Madrid a détrôné son puissant voisin en 2014, sans parler du FC Porto qui remporta en 2004 la Ligue des Champions ouvrant l’ère de José Mourinho.

Faisons donc confiance à cette “glorieuse incertitude du sport” et au mystère du football. Tant que le match n’est pas terminé, Paris a toutes ses chances. Outsider économique, il ne tient qu’à lui de renverser l’ordre établi par la maison merengue. C’est notamment pour cela que le PSG a choisi d’investir autant sur Neymar, Kylian Mbappé et Edinson Cavani.

Par Jean-Baptiste Guégan

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