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Rétro – FC Sochaux-Montbéliard, berceau du professionnalisme !

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Le FC Sochaux-Montbéliard fut l’un des grands artisans de la légalisation du professionnalisme dans le football français en janvier 1932 ouvrant la voie à l’instauration quelques mois plus tard d’un Championnat national. Rétro par Benoît Wantz.

Le FC Sochaux[1] naît en 1928 par la volonté de Jean-Pierre Peugeot, directeur du groupe éponyme. Dès les premiers mois de son existence, il apparaît évident que le club nourrit d’autres ambitions que d’évoluer face à des équipes locales. Une politique de recrutement de vedettes de l’époque est en effet mise en place attirant dans le Doubs plusieurs internationaux français et étrangers. Malgré plusieurs projets avortés, il n’existe pas encore de Championnat de France, les formations se confrontant au sein de leurs Ligues régionales. Une élimination précoce en Coupe de France qui fait figure de compétition reine, marque donc un coup d’arrêt brutal à l’intérêt de la saison d’un club. Afin de disputer davantage de rencontres et d’asseoir sa réputation naissante, le FC Sochaux organise ainsi des matchs-exhibition de prestige en Allemagne, en Tchécoslovaquie ou encore en Belgique.

L’amateurisme marron

A des journalistes qui l’interrogent en 1930 sur ses arguments pour recruter des joueurs de belle renommée, Jean-Pierre Peugeot a cette réponse : « nous payons nos joueurs ». Si ces propos peuvent prêter à sourire aujourd’hui, ils sont révolutionnaires à une époque où – l’amateurisme marron[2] – est la règle. Le sport est vu comme une pratique idéalisée qui doit se préserver de l’argent afin de demeurer un jeu. Le professionnalisme a pourtant été créé dès 1885 dans le football anglais et peu à peu, il se développe sur le continent. La première Coupe du monde vient d’avoir lieu en 1930 en Uruguay et si le football français n’évolue pas, il risque de ne plus être compétitif au niveau international.

La Coupe Peugeot

En chef d’entreprise, Jean-Pierre Peugeot ne peut se résoudre à cette situation qui limite l’intérêt de son investissement dans le football. Aidé de son bras-droit Sam Wyler, il décide en 1930 d’organiser sa propre compétition : la Coupe Peugeot (rebaptisée Coupe Sochaux par les médias). La forme est novatrice pour l’époque : les meilleures équipes françaises s’affrontent dans un Championnat en matches aller-retour conclu par une finale à Paris. Huit équipes sont engagées lors de la première édition (victoire de Sochaux) puis vingt lors de la seconde (victoire de Mulhouse). Les rencontres sont suivies par des milliers de spectateurs et de nombreux journalistes, ravis de l’excellent spectacle proposé. Ce coup de poker de la firme Peugeot et de son directeur s’avère donc un coup de maître.

L’instauration du professionnalisme et du Championnat de France

Dès lors, la Fédération française de football-association (FFFA) ne peut plus repousser l’échéance[3]. Le professionnalisme est définitivement adopté le 17 janvier 1932. Le premier Championnat de France, baptisé Division Nationale, voit quant à lui le jour le 11 septembre de la même année reprenant le schéma de la Coupe Peugeot. Des restrictions encadrent cependant cette légalisation du professionnalisme qui doit coexister avec l’esprit de la loi de 1901. Ainsi, le salaire maximum est de 2000 francs par mois (environ le double du salaire moyen d’un ouvrier), les contrats signés ne peuvent aller au-delà d’un an et les clubs ont l’obligation d’inscrire leurs équipes réserves dans les championnats amateurs régionaux. La professionnalisation du football est néanmoins bien en marche et seule la seconde guerre mondiale y mettra un coup d’arrêt provisoire. Le FC Sochaux-Montbéliard qui cultive aujourd’hui une image de club sage et discret dans le football français aura donc été à ses débuts un élève turbulent mais ô combien visionnaire.

[1] Créé sous l’entité FC Sochaux le 14 juin 1928, le club devient le 14 mai 1930 le FC Sochaux-Montbéliard que nous connaissons aujourd’hui à la suite de sa fusion avec l’AS Montbéliard.

[2] L’amateurisme marron désigne dans le sport amateur l’octroi d’une rémunération par des artifices comptables : notes de frais gonflées, emploi de complaisance, primes non déclarées…

[3] Si le FC Sochaux-Montbéliard a été le catalyseur de l’instauration du professionnalisme et du championnat de France, d’autres personnages ont été très influents dans cette évolution. Citons Emmanuel Gambardella, Henri Jooris, Jean-Bernard Lévy, Gabriël Hanot ou Georges Bayrou

Sources :
Histoire du FC Sochaux-Montbéliard de Gilbert Baudoin (Editions Horvath)
FC Sochaux-Montbéliard de Fabien Dorier (Editions Alan Sutton)
Le championnat de France de Jean Eskenazi (Editions Famot)

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