Stratégie

Internationalisation des clubs de foot : attention aux faux pas !

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terry bouch / Shutterstock.com

Les enjeux économiques ayant pris une telle ampleur, les grands clubs européens ont désormais l’obligation de promouvoir leur image à une échelle internationale. Mais plus qu’une simple expansion, c’est un véritable travail de réflexion que doivent mener les dirigeants de clubs pour réussir leur stratégie d’internationalisation. Sous peine de commettre certains faux pas. Décryptage par Guillaume Monteiro.

En juillet dernier, le club anglais de Liverpool signait un partenariat avec Tibet Water Resources Limited (TWRL), groupe qui s’occupe de l’extraction de l’eau dans la région du Tibet. Au premier abord, ce partenariat semblait être une bonne opportunité pour développer la marque sur le continent asiatique. D’autant plus que le club venait d’effectuer une tournée d’avant saison à Hong-Kong qui avait suscité l’enthousiasme de la population locale.

Mais ce que les dirigeants de Liverpool n’avaient pas anticipé, c’est les tensions que pouvait susciter un tel partenariat. L’extraction de l’eau est l’un des sujets au centre des tensions politiques entre la Chine et le Tibet. Surnommée « le château d’eau de l’Asie », la région du Tibet possède l’une des plus abondantes réserves en eau au monde. Et beaucoup considèrent que les Tibétains n’ont pas leur mot à dire sur l’utilisation de leurs ressources et sont totalement dépendants des désirs de la Chine.

Ainsi, une pétition a été lancée en octobre dernier par l’organisation internationale SumOfUs qui dénonce le fait que « TWRL est capable d’extraire les ressources tibétaines uniquement parce que la violence militaire de la Chine le permet. Il ne doit ses profits qu’à la répression, à la torture et au déni des libertés politiques qui y sont devenus monnaie courante ». Pour rappel, le Tibet est une région autonome dirigée par le régime de Pékin depuis un traité sino-tibétain signé en 1951 mais de nombreux Tibétains continuent de se référer au Dalaï-lama et critiquent l’ingérence de la Chine.

La mise en place de ce partenariat a donc suscité la polémique, et la pétition a recueilli plusieurs dizaines de milliers de signatures. A travers ce partenariat, certains supporters estiment que le club de Liverpool FC octroie une légitimité à l’occupation chinoise du Tibet. John Jones, le directeur de l’association Free Tibet, a ainsi déclaré que rompre ce partenariat pourrait montrer que « l’engagement éthique et humain du club ne repose pas que sur des mots mais aussi sur des actions ».

Les clubs de football doivent prendre soin de leur identité

De son côté, la société TWRL s’est défendue en mentionnant un rapport publié par le Programme des Nations Unies pour le Développement, évoquant le travail mené par l’entité chinoise auprès des populations locales, favorisant l’amélioration des conditions de vie des Tibétains.

Cette situation est l’exemple parfait d’une stratégie pouvant compromettre l’image d’un club. Contrairement à une marque classique, un lien affectif lie un club de football à une grande partie de sa communauté. Supporter une équipe n’est pas un besoin mais un désir. Toute action mise en place au sein d’un club nécessite donc une réflexion profonde en amont afin de ne pas mettre en danger l’identité de l’institution.

Et c’est plus particulièrement le cas pour les stratégies de développement sur de nouveaux marchés, dont les spécificités sont parfois mal-maîtrisées. Il y a un besoin de compréhension des questions politiques, territoriales et sociétales, avec des marketeurs qui doivent prendre en compte l’ensemble de ces paramètres avant de mettre au point leurs stratégies. L’internationalisation toujours plus importante du football donne l’opportunité aux clubs de conquérir de nouveaux marchés, mais une opportunité qui peut devenir incommodante si elle est mal maitrisée.

Les opposants à l’accord de sponsoring signés entre Liverpool FC et Tibet Water Resources Limited arguent que le club n’a pas besoin d’un tel partenariat commercial, étant donné le montant mirobolant des droits TV de Premier League. Les revenus générés ces dernières saisons par les Reds leur permettraient de se passer sans problème d’un tel contrat selon leur raisonnement. Reste désormais à voir si le club cédera à la pression des associations et d’une frange de ses supporters…

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