Interview

« Nous avons besoin d’alternance à la Fédération Française de Football »

Ecofoot.fr a eu la chance cette semaine de s’entretenir avec François Ponthieu, candidat à l’élection présidentielle de la Fédération Française de Football. Au cours de cet entretien, l’ancien président de la DNCG détaille certaines orientations de son programme tout en revenant sur les raisons de sa candidature.

Pourquoi avez-vous décidé de vous présenter à la présidence de la FFF ?

Le football français doit changer de mode de gouvernance. Dans la prise de décisions et dans la conduite des actions, les dirigeants du football français doivent penser davantage aux implications sur le football amateur. Il faut ainsi redonner du pouvoir à la base, notamment par la concertation. Une méthode qui doit également permettre de rapprocher le football amateur du monde professionnel.

Le football français a également intérêt à encore améliorer son image. La Fédération Française de Football doit consacrer davantage de temps à son rôle social afin de répondre à sa mission de service public. Mission qui est aujourd’hui trop souvent mise de côté.

Aujourd’hui, je suis convaincu que ma candidature est légitime afin de conduire ces changements. Mon implication dans le football ne date pas d’hier (ndlr : François Ponthieu a notamment été président de la DNCG pendant près de 12 ans avant d’intégrer le Conseil fédéral (ancien Comex) de la FFF) et j’estime avoir l’expérience nécessaire, avec mon équipe, pour présider la FFF.

Êtes-vous certain que Noël Le Graët ne se représentera pas à l’élection présidentielle de mars prochain ? (question posée avant l’annonce de la candidature de Noël Le Graët)

Je n’ai jamais dit que Noël Le Graët ne se représenterait pas ! J’ai juste rappelé qu’il avait lui-même indiqué au moment de son élection qu’il n’irait pas au-delà de son mandat actuel. Il avait répété cette promesse en mai 2014 sur les ondes de RMC. Depuis, il n’a cessé de reporter sa décision finale à ce sujet.

La meilleure preuve a été donnée ce week-end, avec la trahison de la parole qui avait été donnée à Jacques Rousselot il y a semble-t-il plusieurs mois par l’actuel président de soutenir sa candidature ! Cette affaire prouve bien, d’une part qu’il a beaucoup hésité, et d’autre part qu’il ne craint pas de revenir sur les promesses faites à ses plus proches soutiens.

Aujourd’hui, quel est votre sentiment au sujet d’une éventuelle candidature de Noël Le Graët ? (question posée avant l’annonce de la candidature de Noël Le Graët)

Le président actuel est depuis 45 ans dans les instances ! Nous avons vraiment besoin d’alternance à la Fédération Française de Football. Selon moi, il faudrait limiter le nombre de mandats présidentiels à deux. Si je venais à être élu en mars prochain, j’appliquerais une telle réforme.

De plus, un changement  à la tête de la Fédération Française de Football s’inscrirait dans le processus de modernisation qui touche actuellement la plupart des instances du football mondial. Au cours des derniers mois, la FIFA, l’UEFA ou encore la LFP ont connu un changement de président. De nombreuses grandes organisations font face à une véritable cure de rajeunissement de leurs dirigeants.

Dans votre programme, vous avez indiqué que vous souhaitez accroître les revenus de la Fédération Française de Football. Comment comptez-vous vous y prendre ?

La question se posera au sein d’une Fédération qui bénéficiera d’une meilleure image. Aujourd’hui, certains comportements nuisent toujours à l’attractivité globale du football français : regardez les évènements inacceptables de ce week-end à Nantes, par exemple. Ils empêchent certains investisseurs de miser sur notre football. La FFF ne perçoit pas non plus toujours l’intégralité des sommes négociées contractuellement avec ses sponsors en raison de certains agissements, qui font baisser les primes.

L’image de notre football doit changer. Concentrons-nous plus sur notre rôle auprès de la société civile, contribuons davantage au développement personnel des jeunes ! En améliorant notre image, on trouvera forcément de nouveaux relais de croissance.

Il est vrai aussi que l’augmentation des ressources peut se faire par … une diminution des dépenses ; or, la mandature qui se termine a connu des licenciements avec des indemnités non négligeables, sans parler des contentieux en cours, avec des départs forcés de certains salariés qui étaient à quelques mois de la retraite…

Dans votre programme, vous indiquez également vouloir créer un « état DNCG » dédié aux agents de joueurs. Comment se traduira concrètement cette mesure ?

Actuellement, une proposition de loi discutée au Parlement vise à donner plus de pouvoirs à la DNCG concernant la régulation des activités des agents de joueurs (ndlr : article 4 de la proposition de loi visant à préserver l’éthique du sport, à renforcer la régulation et la transparence du sport professionnel et à améliorer la compétitivité des clubs). Une partie de la réponse à ce sujet se trouve dans ces textes.

Mon idée est de rajouter une annexe aux comptes qui sont transmis par les clubs à la DNCG faisant référence aux sommes versées aux agents lors de chaque transfert de joueur. Le document pourrait également inclure les principales dispositions contractuelles conclues entre les clubs et les agents. Cela permettrait de connaître rapidement, et de façon officielle, les commissions versées aux intermédiaires.




Le but de cette réforme n’est pas de jeter l’opprobre sur la fonction d’agent. Cette mesure s’appliquerait dans un souci de transparence.

Vous souhaitez exercer une influence sur l’horaire des matchs des clubs professionnels. Comment comptez-vous vous y prendre ? Pourquoi souhaitez-vous revoir l’organisation des journées de L1/L2 ?

Ce serait bien en effet que toutes les rencontres professionnelles du samedi soient jouées au-delà de 17h. Cela permettrait aux rencontres du football amateur et aux plateaux de jeunes de se dérouler sans affronter la concurrence des matchs professionnels retransmis à la télévision.

J’ai déjà évoqué cette mesure avec plusieurs dirigeants. Après, il est évident que nous n’imposerons pas une telle réforme. Il faudra en discuter avec toutes les parties prenantes pour voir s’il est possible de l’appliquer. Si tous les acteurs considèrent que cette mesure est une avancée, nous la mettrons alors en œuvre.

Que comptez-vous mettre en place pour développer le football féminin ?

Il y a plusieurs axes à travailler permettant de développer le football féminin. Mais il faut bien avoir en tête qu’il s’agit d’un travail de long terme !

Déjà, il faut mieux faire connaître la discipline à l’école. Nous devons mener des campagnes de sensibilisation plus importantes. Aujourd’hui, quand on se rend dans les stades ou dans les clubs, on se rend compte que le football est toujours un univers très masculin. Il faut absolument parvenir à faire venir les femmes au stade, pour qu’elles prennent goût à ce sport.

Il est également nécessaire de recruter du personnel féminin à tous les niveaux, et notamment parmi les dirigeants. Ce n’est pas toujours facile pour des jeunes filles d’être systématiquement encadrées par des garçons. Une féminisation des instances sera essentielle pour mener à bien le développement du football féminin.

A travers votre programme, vous souhaitez encourager toutes les pratiques du football, notamment le futsal ou encore le beach soccer. Sous votre présidence, la FFF compte-t-elle également jouer un rôle dans le développement de l’e-sport ?

Pour moi, l’e-football n’est pas du sport. Pour qu’on puisse parler de sport, il est nécessaire d’y intégrer les notions d’activité de plein air ou de dépense physique. L’e-sport ne réunit aucun de ces deux critères. Après, je ne suis pas opposé à réfléchir au développement de cette discipline. Mais l’e-sport ne constitue pas une priorité dans mon programme.

En revanche, concernant le futsal et le beach soccer, je souhaite surtout qu’on prenne en compte ces nouvelles formes de pratique. Aujourd’hui, le public a de plus en plus envie de se livrer à un football loisir, sans forcément tenir compte des performances. Les gens ont envie de s’amuser en pratiquant du football. Le futsal et le beach soccer répondent parfaitement à ce besoin. La Fédération Française de Football doit en conséquence tenir compte de cette évolution pour pouvoir l’accompagner, sans oublier le football d’entreprise, dont je compte développer les liens avec la jeunesse.

Quelle est la ligne directrice à retenir de votre campagne ?

Le football français possède aujourd’hui une énorme notoriété. La France est l’un des grands pays de football. Je suis convaincu qu’en développant la concertation et en faisant travailler main dans la main tous les acteurs du football français, on pourra fortement développer notre discipline tout en renforçant son attractivité à l’étranger.

La FFF doit avoir un rôle social plus important, en remettant au goût du jour des idées de fraternité et de solidarité. Qui mieux qu’elle peut le faire ?


Source photo à la Une : François Ponthieu

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