Interview

M. Wiener (La Poste) : « Venir dans un stade, ce n’est plus simplement acheter une place pour une heure et demie de spectacle »

La Poste services clubs ligue 1
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Le Groupe La Poste a considérablement diversifié ses activités au cours des dernières années, ne se contentant plus exclusivement d’être une entreprise de logistique. Une métamorphose qui est également visible au niveau sportif, secteur au sein duquel l’entreprise multiplie actuellement les initiatives, accompagnant les clubs dans leurs stratégies FRM. Ecofoot.fr s’est entretenu avec Michel Wiener, Directeur du développement des grands événements à La Poste, afin de faire le point sur les nouvelles activités de l’entreprise dans l’univers sportif.

Depuis plus de 10 ans, La Poste sponsorise les arbitres de football. Pourquoi avoir choisi de devenir partenaire des arbitres ? Comment s’inscrit ce partenariat dans la stratégie globale de sponsoring du groupe ?

La Poste ne souhaitait pas s’engager dans un accord classique de sponsoring. Nous n’avions pas besoin de conclure un partenariat pour accroître notre notoriété, qui n’est pas à démontrer. Nous n’avions pas voulu non plus nous adosser à un club plutôt qu’à un autre. Nous recherchions un partenariat illustrant notre présence sur l’ensemble du territoire français. Un partenariat qui nous permettait également d’être à la fois présent dans le sport d’élite et dans le sport amateur.

Ainsi, compte tenu de nos exigences, La Poste a décidé en 2007 de s’engager pour soutenir l’arbitrage. C’est un programme original car il permet de valoriser l’arbitre et son rôle dans les quatre grands sports collectifs (football, rugby, handball et basket). Nous sommes ainsi présents sur les maillots d’environ 50 000 arbitres par saison. Ce qui permet à plus d’un million de joueurs – amateurs et professionnels – de pratiquer leur sport.

Ces partenariats avec les arbitres ont du sens pour notre entreprise. Ils illustrent parfaitement l’engagement de La Poste dans la société, au service de l’intérêt général. Ils nous permettent également de porter les valeurs de La Poste, que sont la confiance, la performance, la lutte contre les incivilités ou encore l’équité.

Comment La Poste active-t-elle ses accords de sponsoring avec les arbitres ?

Le logo de La Poste est présent sur les maillots des différents arbitres. Cela confère une forte visibilité à la marque, à la fois auprès des spectateurs et des téléspectateurs.

Le partenariat est également très visible lors de notre temps fort, à l’occasion des journées nationales de l’arbitrage, organisées chaque année.

Un événement qui est en harmonie avec notre baseline, Tous Arbitres. Une baseline que nous retrouvons en panneautique dans les stades des ligues parrainées et sur les tee-shirts des jeunes qui sont aux côtés des arbitres lors du protocole d’avant-match.

A l’occasion de l’EURO 2016, La Poste a conclu un partenariat inédit avec l’UEFA concernant la livraison des places de foot de la compétition et la mise en place d’opérations spéciales autour de l’événement, dont l’émission de nouvelles séries de timbres. Pouvez-vous revenir sur la genèse et les retombées d’un tel partenariat ?

Le partenariat que nous avions conclu avec l’UEFA reposait sur une idée simple : il n’avait de sens que si son modèle économique était rentable pour les deux parties contractant cet accord.

Et ce partenariat a en effet été rentable pour l’UEFA puisque nous avons pu transporter et remettre en main propre 2,5 millions de billets partout dans le monde, y compris dans des zones peu habituelles pour La Poste tels que les Îles Cook ou encore au Burkina Faso. Et, à chaque fois, avec le même niveau de qualité et de service.

De plus, vous avez raison, le contrat allait au-delà du volet logistique. Car, aujourd’hui, La Poste n’est plus exclusivement une entreprise de logistique. C’est désormais une entreprise de services. Et nous avons souhaité le démontrer à travers ce partenariat avec l’UEFA.

Parallèlement à la livraison des billets, nous avons alors créé une plateforme internet. Cela a permis à tous les acheteurs de billets, où qu’ils soient, de disposer de toutes les informations sur la livraison leurs billets et de bénéficier d’animations exclusives. Un outil qui s’est avéré très utile car, pour des raisons de sécurité et pour limiter les risques liés au marché noir, l’UEFA a imprimé assez tard les billets de la compétition. Le site a notamment permis de désengorger les call-centers de La Poste et de l’UEFA.

Grâce à cette plateforme, qui a recensé plus d’un million de visites, nous avons pu exposer à une audience importante, dans le monde entier, notre savoir-faire et nos compétences. Nous avons entretenu avec les spectateurs de l’EURO 2016 une relation client extrêmement riche et permanente. D’ailleurs, nous avons reçu de nombreux témoignages extrêmement positifs au sujet des services mis en place par La Poste pour l’EURO 2016.

Le deuxième volet du partenariat concernait l’émission de timbres liés à l’événement. Ils ont également joué un rôle important car ils ont permis de valoriser et populariser la compétition et le football en général auprès du grand public. Nous avons édité des timbres en réalité augmentée, permettant de réaliser un travail pédagogique sur les principaux gestes du football. Les gestes ont été choisis par les internautes à la suite d’une grande consultation en ligne.  La campagne a connu un très gros succès commercial puisqu’au total, nous avons vendu près de 30 millions de ces timbres.

Depuis peu, La Poste propose de nouveaux services aux clubs de football afin de les aider à remplir leur stade. Pouvez-vous nous en dire plus sur cette activité ? Pouvez-vous nous citer un exemple de collaboration ?

En effet, nous proposons de nouveaux services aux stades, aux clubs, aux ligues et aux fédérations sportives. Parmi ces nouveaux services, nous aidons les organisateurs à remplir leur enceinte. Car, à de très rares exceptions, les clubs ne jouent pas à guichets fermés.

La Poste, grâce à ses bases de données importantes et très qualifiées, est en capacité d’aider les organisateurs à toucher de nouveaux publics. Par exemple, nous avons récemment aidé l’Olympique Lyonnais à remplir la totalité de ses espaces d’hospitalités et loges. Pour atteindre cet objectif, nous avons construit un dispositif innovant en collaboration avec le club.

Après avoir réalisé un ciblage dans nos bases de données permettant de construire un fichier personnalisé de 11 700 décideurs régionaux – regroupant des directeurs marketing, de communication ou des présidents de PME/TPE – nous leur avons envoyé une clé USB présentant tous les dispositifs B2B commercialisés par l’OL au Groupama Stadium. Grâce à cet envoi, l’OL a ensuite pu rencontrer bon nombre de décideurs intéressés par les offres commercialisées par le club.

Nous sommes également capables de concevoir de tels dispositifs dans le domaine B2C. Car La Poste est en contact avec tous les publics. Nous sommes en capacité, par exemple, de cibler des étudiants de la région, des familles ou encore des salariés des comités d’entreprises. A travers nos bases de données et nos datas segmentées, nous pouvons toucher les publics intéressés par le sport ou tout simplement par l’idée d’une sortie, mais qui n’auraient pas pensé spontanément à se rendre au stade.

Pour pouvoir capter ces nouveaux publics, nous savons nous montrer innovants en proposant de nouvelles formules. Par exemple, grâce à différents partenariats, nous sommes en mesure de construire des packs, contenant la place de stade mais aussi un billet de transport voire demain une nuitée d’hôtel.

En plus de la problématique de remplissage des stades, La Poste propose également d’accompagner les clubs dans la construction de leur stratégie « fan expérience ». Pouvez-vous nous en dire plus au sujet de cette activité ?

En effet, en plus d’aider les clubs à remplir leur stade, La Poste les accompagne également sur les problématiques de fan expérience. Venir dans un stade, ce n’est plus simplement acheter une place pour une heure et demie de spectacle. Un spectateur doit vivre l’événement avant, pendant et après ce dernier. L’expérience doit désormais démarrer dès le moment où un spectateur achète son billet.

Grâce à la conclusion de différents partenariats, nous accompagnons déjà les clubs dans l’accroissement de cette expérience stade. Par exemple, via un partenariat conclu avec certains transporteurs, nous faisons démarrer l’expérience spectateur dès le moment où le fan monte dans le car pour se rendre au stade. Des concours de pronostics sont alors organisés et des images du club sont diffusées sur les écrans du bus. Des animations peuvent également être mises en place lors du voyage retour.

Désormais, nous cherchons à aller encore plus loin. A travers la connaissance client, nous allons aider les clubs à concevoir des animations mieux adaptées à chacun des publics. Par exemple, si une rencontre est planifiée le vendredi soir, on va alors davantage cibler les salariés d’entreprise dans les campagnes de prospection. Et nous pouvons conseiller les clubs dans la mise en place d’événements en affinité avec une telle cible, qui va vivre cette soirée comme un after-work. Le concept sera naturellement différent lorsque le club aura ciblé prioritairement des étudiants pour un match en semaine, ou encore un public familial à l’occasion d’un match le dimanche après-midi.

L’idée est de prolonger l’expérience liée au spectacle sportif par d’autres activités. Cela permet alors aux clubs d’attirer et de fidéliser de nouveaux publics, de les amener à vivre une expérience enrichie et donc à consommer davantage sur place.

L’objectif d’une telle segmentation est de définir des typologies d’attentes par type de public et donc de conseiller l’organisateur sur la mise en place d’activités et de services, en amont et en aval de l’événement, répondant parfaitement aux attentes d’une telle cible.

Comment s’articule concrètement une collaboration entre un club de football et La Poste ?

En réalité, notre dispositif s’adapte à tous les niveaux de maturité des clubs. Mais il faut savoir que, même parmi les clubs ayant des politiques CRM très développées et structurées, certains d’entre eux ne parviennent pas aujourd’hui à faire communiquer leurs bases de données de billetterie et de merchandising par exemple. Or, tant que ces bases de données ne sont pas reliées entre elles, la stratégie de revenus d’un club ne peut être optimale.

Après, il y a des cas où les clubs partent de quasiment zéro en termes de stratégie FRM/CRM. Dans ce cas, nous sommes en capacité de bâtir les bases de données, de faire du profiling et d’assister le club dans la conception de sa stratégie marketing. Grâce aux informations que nous possédons, grâce à la data-science et à ses modèles prédictifs, nous sommes en mesure de bâtir des stratégies d’activation marketing extrêmement poussées pour les clubs sportifs.

Êtes-vous accompagné par d’autres entreprises dans vos activités menées auprès des clubs de football ?

Oui, nous nous sommes entourés de plusieurs start-up qui collaborent avec nous au niveau national. Et nous sommes ouverts à travailler avec de nouvelles entités, à l’échelle nationale ou locale. Nous croyons à l’idée de bâtir des synergies au niveau régional avec les clubs avec lesquels nous collaborons, en co-construisant avec eux l’écosystème et le modèle les plus adaptés à leurs besoins.

Quel est le modèle économique adopté lors de la conclusion d’un partenariat entre La Poste et un club de football ?

Nous pouvons déployer plusieurs modèles économiques. Nous facturons les prestations en y intégrant nos coûts de setup et de fonctionnement. Mais nous pouvons également travailler à la performance, en recevant une commission sur les revenus additionnels engendrés.

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