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Financement du football amateur : un modèle à réinventer ?

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Ayant longtemps compté sur les subventions pour équilibrer leur budget, de nombreux clubs amateurs se retrouvent aujourd’hui en difficulté face aux restrictions budgétaires imposées par le gouvernement en place. Pour subvenir à leurs besoins, les clubs vont alors devoir repenser leur modèle en profondeur pour générer de nouvelles rentrées financières.

Accueil de l’EURO 2016 et du championnat du monde de handball 2017, organisation à venir de la Coupe du Monde de rugby 2023 et des Jeux Olympiques de 2024… En apparence, la France semble être devenue la nation sportive par excellence. Encore davantage si on y ajoute les succès mondiaux glanés, dont la dernière Coupe du Monde disputée en Russie.

Si l’organisation de grands événements facilitent les investissements en infrastructures favorisant le sport d’élite ; en revanche, le sport amateur français semble avoir été complètement oublié dans la feuille de route dressée ces dernières années par nos élites politiques.

Et les premières décisions prises par le gouvernement Philippe n’ont pas réellement rassuré le monde amateur. Dès son arrivée à Bercy, Gérald Darmanin, Ministre de l’Action et des Comptes Publics, annonçait un plan d’économie de… 4,5 Mds€ concernant les dotations territoriales. Sur l’ensemble du quinquennat Macron, c’est une baisse de budget de 13 Mds€ à laquelle devront se soumettre les différentes collectivités. Un choc difficile à encaisser après avoir déjà subi une cure d’austérité de 11,5 Mds€ sur la fin du quinquennat… Hollande !

Alors que les décideurs politiques prêtent généralement peu d’attention au sport, les arbitrages budgétaires réalisés par les différentes collectivités sont rarement en faveur du monde sportif amateur. Sur la seule saison 2014-15, un quart des communes ont réduit les subventions accordées aux associations sportives. Et alors que les subventions représentent en moyenne un tiers du budget des associations sportives, de nouvelles réductions pourraient fortement compromettre les activités de nombreux petits clubs de quartier.

La difficulté de professionnaliser les structures d’un club amateur

La baisse des subventions n’est pas la seule pilule difficile à avaler pour les clubs amateurs. En attendant de connaître les effets réels de la baisse du budget du Ministère des Sports, la suppression progressive des emplois aidés constitue une autre difficulté à surmonter pour le monde sportif d’en bas. Alors que l’utilité de tels contrats dans le secteur sportif a été avérée par plusieurs études, le gouvernement Philippe a décidé de passer outre les complaintes manifestées par les associations.

Et l’effort prévu par la Fédération Française de Football ne suffira pas à compenser la baisse des dotations publiques dans la plupart des cas. D’autant que les clubs amateurs ne recevront pas directement l’intégralité des 96 M€ promis par la FFF en cette saison 2018-19 : une partie de cette enveloppe sera destinée au fonctionnement des ligues et des districts.

Les clubs amateurs se doivent alors de trouver de nouvelles sources de revenus pour pouvoir surmonter les difficultés. Une des pistes souvent évoquées est l’accroissement des revenus de sponsoring. Représentant généralement 5% de leurs revenus, bon nombre de clubs amateurs imaginent pouvoir gonfler leur portefeuille de partenaires au prix de campagnes de prospection plus intenses.

Une supputation qui se heurte régulièrement à la cruelle réalité. En raison d’une faible valeur ajoutée apportée aux partenaires, les clubs amateurs éprouvent de grosses difficultés à recruter de nouvelles entreprises au sein de leur réseau de partenaires. Selon une étude dernièrement conduite par Call4Sport/Foot Amateur, 65% des clubs amateurs interrogés estiment qu’il est très difficile – voire impossible – de trouver de nouveaux sponsors. Les campagnes de prospection s’avèrent alors gourmandes en ressources pour des résultats mitigés. Des mécanismes incitant les acteurs privés à investir dans le sport amateur seraient alors les bienvenus.

Trouver un modèle alternatif de développement

En cette période de profonds changements, les clubs amateurs doivent impérativement saisir l’occasion pour repenser en profondeur leur modèle. Le meilleur moyen de se sortir de cette période de turbulences est d’adopter un projet différenciant, recentré sur les points forts de l’association. En adoptant un positionnement clair et resserré, les associations seront alors en mesure de s’insérer dans un cycle vertueux, entraînant notamment une croissance du nombre de licenciés et, par conséquent, une hausse de recettes.

Certains clubs à différents niveaux ont su prendre ce virage. Ayant déployé d’importants moyens sur la formation, l’AC Boulogne Billancourt Football parvient aujourd’hui à tirer de substantiels revenus grâce aux départs de ses jeunes pépites vers les centres de formation des clubs professionnels. Un savoir-faire qui a même permis au club de la petite couronne parisienne de nouer un partenariat poussé avec… l’Olympique Lyonnais. Une qualité qui pourrait amener certains anciens dirigeants de clubs professionnels à s’intéresser au cas boulonnais.

Autre exemple intéressant : celui du club toulousain de l’AS Hersoise. Club ravagé par un incendie accidentel en 2016, l’AS Hersoise a su depuis rebondir grâce à l’abnégation de ses nouveaux dirigeants. Reparti sur un projet mettant en avant la pédagogie et l’ancrage territorial, l’AS Hersoise est parvenue à conserver un appui solide des collectivités locales malgré cette période d’austérité. Et le club espère désormais profiter de ses liens étroits construits avec son territoire pour séduire de nouveaux partenaires.

Pour pouvoir enclencher une nouvelle dynamique positive, les clubs amateurs doivent apprendre à structurer leur fonctionnement et mieux communiquer sur leurs actions pour séduire adhérents, partenaires, collectivités et bénévoles. Une transformation qui nécessite parfois quelques remises en question dans les comités de direction des associations. Mais c’est souvent dans les périodes de crise que la liberté créatrice donne naissance aux plus belles innovations.

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