Géopolitique

La Chine va-t-elle devenir une superpuissance du football ?

chine puissance footballistique
Shutterstock.com

Alors que le président chinois, Xi Jinping, a impulsé une politique volontariste en matière d’investissement dans le football depuis son accession au pouvoir en 2013 ; la sélection chinoise tarde à élever son niveau de jeu. L’apprentissage du très haut niveau pourrait prendre plus de temps que prévu…

« Quand la Chine s’éveillera… le monde tremblera. » Si l’exercice de prospection mené par Alain Peyrefitte en 1973 s’avère plutôt juste sur le plan économique ; au niveau footballistique, la Chine tarde à obtenir des résultats.

Qualifiée à une seule reprise pour une Coupe du Monde dans son histoire – pour aucun but en compétition – la Chine est encore aujourd’hui un nain de la planète football. Classé au 75ème rang au classement FIFA, la sélection chinoise n’est pas parvenue à se qualifier pour le mondial russe, se faisant dominer par le… Qatar lors du 2ème tour de qualification.

Pourtant, Xi Jinping n’a pas compté ses efforts pour accroître la compétitivité du football chinois depuis sa prise de pouvoir en 2013. Amateur de ballon rond, Xi Jinping souhaite impérativement développer le football en Chine pour compléter la puissance globale de son Etat tout en amorçant une tertiarisation de l’économie chinoise, via la création d’une véritable industrie du loisir.

Et les objectifs sont plutôt élevés. En plus d’organiser – et de gagner ! – une Coupe du Monde d’ici 2050, la Chine souhaite voir le football représenter autour de 1% de son Produit Intérieur Brut d’ici… 2025 !

La politique volontariste menée par Xi Jinping

En matière de planification, l’Etat chinois possède une solide expérience en la matière. Et le plan de développement du football exposé par le gouvernement chinois en 2016 ne déroge pas à cette règle. Bien au contraire.

Ainsi, selon les éléments exposés, le pays souhaite se doter de 60 000 terrains de football additionnels d’ici 2022. Et la Chine espère pouvoir compter sur 90 millions d’enfants et d’adultes pratiquant occasionnellement ou fréquemment le football à horizon… 2020 !

Avant même le dévoilement du plan de développement, de nombreux acteurs de l’économie chinoise ont commencé à investir dans le football pour répondre aux exigences du pouvoir central. Plusieurs grosses entreprises du pays ont investi dans la Chinese Super League, à l’image d’Alibaba qui a injecté 140 M€ pour racheter 50% de Guangzhou Evergrande ou de Suning qui a acquis le club de Nankin en 2016. De nombreux investisseurs chinois ont acquis des participations ou racheté intégralement des clubs européens pour importer un savoir-faire au pays. Enfin, plusieurs entités chinoises ont acquis des packs de sponsoring de premier plan auprès de la FIFA.

La Chine réoriente sa politique d’investissement

Alors que cette première phase a créé une véritable surchauffe en termes d’investissement – surinvestissement des patrons de Chinese Super League pour faire venir des stars européennes et sud-américaines, fuite des capitaux vers les clubs européens… – sans véritablement répondre aux objectifs des décideurs politiques chinois, le pouvoir central a décidé de réorienter sa stratégie en imposant de nouvelles restrictions.

Afin de favoriser l’éclosion de jeunes pépites nationales dans le championnat de Chinese Super League, la fédération a ainsi restreint les quotas de joueurs étrangers. De plus, une taxe de luxe de 100% a été mise en place pour les clubs cherchant à recruter des joueurs à plus de 6 M€ sur les marchés étrangers. Une mesure qui a permis de renforcer le financement du fonds national de développement des jeunes joueurs chinois mais qui a considérablement freiné les investissements des clubs de CSL sur le marché des transferts.

En parallèle, la Chine a dressé des barrières contraignantes afin de limiter les investissements opérés par les entreprises chinoises dans des entreprises sportives/du divertissement étrangères. De nouvelles mesures qui ont notamment compliqué le rachat du Milan AC par l’homme d’affaires Yonghong Li et qui a également entraîné le départ de Wanda du capital social de l’Atletico de Madrid.

Créer une culture footballistique, cela prend du temps

Malgré quelques tergiversations dans le modèle à adopter, la Chine souhaite obtenir des résultats rapidement. Outre les résultats économiques, l’administration chinoise aimerait déjà disposer d’une équipe nationale compétitive dès 2030, lors d’un Mondial qu’elle pourrait organiser sur son sol.

Or, de tels objectifs ne sont pas compatibles avec les réalités de la discipline. Outre le temps nécessaire pour assimiler le savoir-faire et récolter les fruits d’un travail de formation en profondeur, la Chine doit également faire face à quelques résistances culturelles qui entravent la bonne marche de son développement footballistique.

En effet, la population chinoise reste aujourd’hui peu encline à pousser leurs enfants à faire du football. Privilégiant les études de leur progéniture, le sport – et surtout le football – est globalement peu valorisé dans le parcours scolaire et académique des étudiants chinois.

De même, l’aménagement du territoire chinois ne facilite pas la tâche. Alors que le football est essentiellement popularisé dans les grandes métropoles de l’est du pays – en raison d’une concentration des investissements – le développement de la discipline pourrait être considérablement freinée par la prétendue « bulle » immobilière, favorisant la construction d’immeubles au détriment des terrains de football.

Malgré une volonté ferme de développer le football au pays, la Chine est encore à des années lumières des meilleures nations du football mondial. Et ce ne sont pas les lourdes défaites subies face au Pays de Galles et à la République Tchèque au mois de mars dernier qui viendront contredire cette évaluation. La Chine mettra du temps pour construire une sélection nationale solide, en capacité de rivaliser avec les meilleures équipes au monde. N’en déplaise à Xi Jinping.

To Top
Send this to a friend