Stratégie

La fédération allemande incapable d’intégrer les talents issus de l’ex-RDA ?

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Si l’élimination surprise de la sélection allemande au premier tour de la Coupe du Monde 2018 ne doit pas remettre en cause l’excellent travail réalisé par le foot allemand dans le domaine de la formation au cours des dernières années ; cet échec permet néanmoins de mettre en lumière certains problèmes que devra corriger la Fédération Allemande (DFB) à l’avenir. Décryptage…

Suite à l’élimination de l’Allemagne au premier tour de la Coupe du Monde, de nombreux spécialistes du ballon rond ont cherché la petite bête pour expliquer ce retentissant et inattendu échec sportif. Alors que de multiples analyses tactico-sportives ont été relayées dans la presse européenne – notamment au sujet des déséquilibres provoqués par des milieux axiaux un peu trop joueurs – d’autres facteurs plus structurels ont également été mis en évidence.

Dont notamment le déséquilibre géographique dont souffre la Nationalmannschaft. En effet, parmi les 23 joueurs convoqués par Joachim Löw ; seulement un élément est né en ex-RDA. Il s’agit du milieu de terrain défensif du Real Madrid, Toni Kroos. Et l’exemple n’est pas vraiment parlant : le joueur a quitté l’ex Allemagne de l’Est à 16 ans pour rejoindre… le centre de formation du FC Bayern.

Un héritage difficile à porter

Pourtant, cette sous-représentation des joueurs issus de l’ex-RDA n’a pas toujours été de vigueur depuis la réunification. Ainsi, lors de l’édition 2002 de la Coupe du Monde – édition au cours de laquelle l’Allemagne s’est hissée en finale de la compétition face au Brésil – seulement 9 éléments des 20 joueurs de champ étaient nés en Allemagne de l’Ouest. Un équilibre quasi-parfait qui permettait également de mettre en valeur les « produits » formés par les clubs issus de l’ex-RDA.

Mais la situation s’est depuis profondément déséquilibrée. En effet, les joueurs intégrant les premières sélections suite à la réunification ont été formés dans des clubs de RDA qui bénéficiaient encore d’importantes subventions en provenance de l’Etat. Des subventions qui ont permis pendant longtemps aux clubs de la RDA d’entretenir un bon niveau de compétitivité. Le FC Magdeburg a notamment remporté l’édition 1974 de la Coupe des Coupes.

Le passage brutal d’une économie socialiste au monde capitaliste au début des années 1990 a profondément chamboulé les grands clubs de l’ex-RDA. Des clubs qui ont été d’autant plus déstabilisés quelques années plus tard par l’arrêt Bosman.

Alors que les clubs d’Allemagne de l’Ouest avaient pris pour habitude de développer leur modèle économique à partir de fonds privés, les clubs est-allemands n’ont pu transformer leur modèle. Résultat : aucun club d’Allemagne de l’Est n’est parvenu à maintenir une présence continue en Bundesliga 1. Et les fonds accordés à la formation ont diminué drastiquement !

« D’un seul coup, nos clubs ont été privés de subventions. Et nous n’avions aucune idée de comment gérer une entreprise dans un monde capitaliste » avait alors tenté de justifier à l’époque Detlef Krauspe, ancien patron du Sachsen Leipzig. « Les clubs de l’Allemagne de l’Est n’ont que des petits partenaires dans leur portefeuille de sponsors. Ils n’offrent pas assez de garanties dans la durée » expliquait ainsi au début des années 2010 Georg Moldenhauer, patron emblématique de la Fédération du Nord-Est Allemand (NOFV). Un constat qui contraste avec les clubs de l’ex-RFA, qui ont su bâtir d’étroites stratégies de développement avec les grosses entreprises de leur territoire.

La lueur RB Leipzig ?

Cette absence des clubs d’Allemagne de l’Est aux premières places de Bundesliga a pris fin dernièrement avec le RB Leipzig. Modeste club de la banlieue de Leipzig « racheté » en 2009 par l’entreprise Red Bull – en jouant sur les règles en matière d’actionnariat en place dans le football allemand – la firme de boissons énergétiques est parvenue en moins de 10 ans à propulser son club en Champions League !

Et même si ce retour sur le devant de la scène ne plait pas aux puristes du football allemand qui restent nostalgiques des performances du FC Lokomotive Leipzig ; les dirigeants du football est-allemand ont au départ vu d’un bon œil l’arrivée de Red Bull dans la région. « Au cours des 20 dernières années, nous avons sans cesse regretté l’absence des grands sponsors dans notre région. Je suis donc désormais ravi que, pour la première fois, un modèle avec un tel partenariat prenne forme en Allemagne de l’Est » avait alors indiqué en 2010 Georg Moldenhauer.

Néanmoins, malgré la montée en puissance du RB Leipzig, les jeunes talents est-allemands tardent à éclore. Car le nouveau club phare de Leipzig semble focaliser sa stratégie sur le recrutement de jeunes talents internationaux plutôt que sur la mise en place d’une vraie politique de formation de jeunes pépites locales. Une politique qui ne va pas améliorer sa cote de popularité en Allemagne. Et qui ne fait pas les affaires de la DFB…

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