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Politique / Droit

Sport : l’indispensable dialogue social

Dans une tribune rédigée pour Ecofoot, Me Gautier Kertudo, Avocat Associé au sein du cabinet Barthélémy-Avocats, rappelle les vertus du dialogue social dans le secteur du sport professionnel français. Un dialogue social qui devra être maintenu lors des semaines à venir pour préserver les intérêts économiques et sociaux de tous les acteurs en cette période trouble pour l’ensemble de l’industrie sportive.

L’Organisation Internationale du Travail (OIT) considère que le dialogue social inclut « tous types de négociation, de consultation ou simplement d’échange d’informations entre les représentants des gouvernements, des employeurs et des travailleurs selon des modalités diverses, sur des questions relatives à la politique économique et sociale présentant un intérêt commun » .

Ces derniers jours l’intérêt commun des acteurs du sport s’est concentré autour d’un thème : la question du sort de la rémunération des joueurs et des entraineurs. La négociation collective s’est imposée alors que la décision ne pourra résulter au final, que de l’accord individuel du sportif salarié. Dès lors, pourquoi considérer que le dialogue social serait indispensable ?

D’abord parce que les négociations dans les autres pays européens ont démontré que l’absence d’échange constructif n’avait fait qu’altérer les relations entre les différents acteurs. Le manque de concertation a fait apparaître chaque jour des prises de positions individuelles divergentes de clubs ou de joueurs augmentant parallèlement les tensions entre chacune des parties intéressées.

En France, la négociation s’est imposée car les partenaires sociaux des disciplines concernées ont souhaité trouver une position commune sur la question du versement des rémunérations. Dans les autres pays européens comme l’Angleterre, l’Espagne ou l’Italie, les clubs, voire les joueurs, ont très vite fait part de leur volonté de baisser leur rémunération sans qu’il y ait eu d’harmonisation des décisions au niveau de l’ensemble des clubs du championnat. Cette différence au niveau européen s’explique notamment par le fait que les joueurs négocient, par exemple dans le football, directement avec les clubs ou avec la ligue. En France, l’existence de syndicats patronaux dans le sport et dans les disciplines a permis d’avoir un dialogue social plus proche du terrain et plus efficace.

En l’absence de dialogue social, les mesures retenues seraient peut-être plus complexes à imposer aux joueurs et aux entraîneurs de manière unilatérale. La négociation collective est une sécurisation et un gage de sincérité des dispositions retenues pour faire face à la crise.

Ensuite, le dialogue social est le garant de l’équité entre chacun des acteurs du sport professionnel. Il permet une prise de décision collective et adaptée à l’économie générale des championnats. La rédaction d’un accord dérogeant aux règles légales permet également de faire état en préambule du contexte et de rappeler les raisons qui ont poussé les partenaires sociaux à négocier.

Et puis, si le dialogue social est mis de côté en ces temps de crise, la sortie de confinement ne pourra s’avérer que plus difficile pour les partenaires sociaux lorsqu’il s’agira de faire appel à la solidarité et à l’esprit « collectif » pour des négociations futures. Or, « le dialogue social dans le sport a toujours été étroitement lié à la capacité de ses acteurs à se mobiliser » et cela dès la rédaction des premières lignes de la convention collective nationale du sport et dès la rédaction des accords de discipline. Il se doit d’être fort en temps de crise et pas seulement. Aujourd’hui, si une harmonisation des propositions et des issues de crise est trouvée grâce aux échanges entre les clubs, les joueurs et les entraineurs, les échanges et les futures négociations post crises seront plus aisés.

Les ordonnances du 22 septembre 2017 , ont consacré la prééminence de l’accord d’entreprise redéfinissant dès lors ce que certains ont appelé « l’ordre public sportif » . Au lendemain de ce bouleversement conventionnel, il pouvait être craint une atteinte à l’équité sportive et spécialement au fonctionnement régulier des compétitions. Depuis trois ans, c’est bien le dialogue social par discipline qui a empêché cette dérive et est devenu le garant de l’harmonie des compétitions professionnelles.

Le secteur du sport professionnel est toutefois un faible consommateur de ce type d’accord. Le nombre peu important d’accords d’entreprise s’explique aussi par la volonté des partenaires sociaux de conserver une certaine harmonisation des règles sociales garantes de l’équité.

Le débat pourrait être ici de l’étage conventionnel auquel doivent se dérouler les négociations mais le temps et l’urgence sociale semblent évacuer (provisoirement) cette question. Les acteurs du dialogue social dans le sport ont connaissance des échéances qui les attendent une fois la sortie de crise terminée. Ils ont surtout connaissance de l’importance du dialogue social dans la sortie de crise.

Cette tribune a été rédigée par Me Gautier Kertudo, Avocat Associé chez Barthélémy Avocats.

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